Ton Koopman à Toulouse pour son dramatique Requiem de Mozart

CRITIQUE, concert. TOULOUSE. Halle-aux-Grains, le 27 octobre 2023. Bach, Hummel, Mozart. Orch et Chœurs du Capitole. J. Martineau, T. Koopman.

Un concert jubilatoire

Ce concert évènement à Toulouse a été auréolé de deux soirs successifs. Ton Koopman est un véritable monument musical à lui seul. Claveciniste et chef célébrissime, il a une carrière époustouflante et sa discographie est pléthorique.  Il n’avait pas encore dirigé l’orchestre du Capitole ni son chœur.

La joie mutuelle semblait diffuser de part et d‘autre. Disposant des forces musicales comme il le souhaitait Ton Koopman a associé un orchestre de dimension réduite et un chœur au grand complet. Ce choix au départ un peu surprenant a été payant par une montée en puissance émotionnelle assez exceptionnelle. La troisième suite pour orchestre de Bach en ré majeur est brillante et puissamment articulée. Trompettes et timbales donnent toute la majesté attendue dans l’ouverture à la française. La direction de Ton Koopman obtient des musiciens de l’orchestre un jeu souverain, plein de lumières, de couleurs éclatantes et de nuances subtiles. Car ce qui importe avec un chef aussi charismatique c’est bien ce qui se passe dans l’orchestre. Galvanisé par un chef véritablement aux anges, leur interprétation n‘a rien à envier aux ensembles baroques. Tout est magnifiquement réalisé dans une légèreté aérienne. Puis les sublimes suites de danse défilent avec beaucoup de grâce. Les phrasés subtils des cordes apportent beaucoup de mélancolie ou de joie. Voilà un très beau travail d’orchestre.

La venue du mandoliniste Julien Martineau a ravi le public toulousain qui connaît bien cet enfant du pays à la carrière internationale. Le concerto de Hummel est une œuvre pleine de charmes, le chef qui ne la connaissait pas semble la déguster. Le jeu de Julien Martineau est d’une musicalité consommée.  Sa virtuosité décoiffe. La capacité du mandoliniste à chanter sur ses cordes pincées est absolument incroyable. Ce délicat concerto est un moment de charme absolument délicieux. Le public ovationne le divin mandoliniste qui donne un bis subtilement nuancé.

Après cette belle lumière de Bach et cette sensualité du concerto l’entracte permet au chœur du Capitole de s’installer pour la pièce maîtresse du concert : le Requiem de Mozart. L’orchestre s’étoffe avec les clarinettes et les cors, les quatre solistes s’installent derrière l’orchestre et devant le chœur.  Le chœur du Capitole semble être au complet. L’équilibre est donc en sa faveur. Ton Koopman de sa direction acérée offre une version très contrastée et très dramatique de ce chef d’œuvre si émouvant. Il tire le chœur vers le plus de légèreté et de virtuosité possible. Les tempi vifs ne les mettent pas en difficulté. Le chef obtient de très belles nuances et des phrasés bien découpés. Tous les pupitres sont homogènes, les couleurs des ténors et des altos touchent au sublime. Les basses sont plutôt claires tout en étant bien présentes. Ce sont les soprano (de chœur d’opéra) qui avec une couleur assez corsée n’atteignent pas le chant diaphane et céleste du Voca me du Confutatis. Les quatre solistes ont été parfaits. Ce qui est attendu d’une rencontre entre un orchestre et un chœur symphonique avec un chef baroque si doué, c’est bien qu’il insuffle à tous son esthétique et son style. Cela a parfaitement fonctionné ce soir et le public a semblé enchanté. Une Halle-aux-Grains pleine à craquer deux soirs de suite leur a fait à chaque fois un véritable triomphe.

Hubert Stoecklin

CRITIQUE, concert. TOULOUSE. Halle-aux-Grains le 27 octobre 2023. Jean- Sébastien Bach ( 1685-1750) : Suite pour orchestre n°3 en ré majeur, BWV 1068 ; Johann Nepomuk Hummel ( 1778-1837) : concert pour mandoline en sol majeur, S 28 ; Wolfgang Amadeus Mozart ( 1756-1791) : Requiem en ré mineur, KV 626 ; Julien Martineau, mandoline ;  Elisabeth Breuer, soprano ; Lara Morger, Mezzo-soprano ; Kieran White, ténor ; Benjamin Appl, baryton ; Chœur de l’opéra national du Capitole , chef de chœur Gabriel Bourgoin ; Orchestre national du Capitole de Toulouse ; Direction , Ton Koopman. Photos : Romain Alcazar.

 SUITE 3 de Bach

Julien Martineau Hummel

Confutatis Ton Koopman

Splendides Perles pour l’ouverture du Capitole

CRITIQUE.OPÉRA. TOULOUSE. 5 octobre 2023. GEORGE BIZET : LES PECHEUR DE PERLES. Nouvelle production. Victorien VANOOSTEN. Thomas LEBRUN. Anne-Catherine GILLET. Mathias VIDAL. Alexandre DUHAMEL. Orchestre ballet et chœur du Capitole. 

OUVERTURE DE SAISON GRANDIOSE À TOULOUSE

Nous les attendions depuis 2020 ces Pêcheurs de Perles de Bizet. Les interdits puis les restrictions sanitaires avaient conduit Christophe Ghristi à monter avec la même distribution un bien agréable Cosi Fan Tutte.

En trois ans les voix des trois chanteurs principaux ont évolué, ainsi le soprano d’Anne-Catherine Gillet est plus corsé ce qui lui permet un troisième acte très dramatique. Elle garde l’aisance suprême dans les vocalises et les suraigus à l’acte un, le lyrisme romantique de l’acte deux lui permet dans des phrasés amples un beau portrait d’amoureuse. Le personnage de Leïla à l’instar de Violetta dans la Traviata de Verdi demande une évolution vocale que peu de cantatrices maitrisent à ce point. Voilà une belle incarnation vocale et scénique pour Anne-Catherine Gillet.

Le baryton Alexandre Duhamel avec une voix sonore et bien timbrée trouve des accents très dramatiques dans l’acte trois. Son air cornélien est absolument superbe et le duo violent qui l’oppose à Leïla trouve avec ces deux interprètes engagés une très belle évolution dramatique. La puissance de la musique de Bizet en est magnifiée.

En Nadir Mathias Vidal n’est pas indigne mais n’est pas à la hauteur de ses collègues. Le chant est soigné, c’est le timbre si clair et qui manque de chaleur qui ne permet pas un bon équilibre avec le Zurga d’Alexandre Duhamel et la chaleur amoureuse ne fonctionne pas suffisamment avec la Leïla si vibrante d’Anne-Catherine Gillet. Ce n’est pas la puissance de la voix qui est en cause car dans les ensembles il est bien présent mais de couleur trop blanche.

Jean-Fernand Seti en Nourabad est parfait d’autorité tant vocale que scénique. Les chœurs très sollicités sont superbes tout du long. Nuance subtiles, couleurs changeantes, le travail avec leur nouveau chef de chœur, Gabriel Bourgoin, est magnifique. Les petits décalages dans le lointain sont de peu d’importance dans une prestation si excellente de bout en bout. L’orchestre du Capitole semble fait pour cette musique tant leur bonheur semble total. Les bois ont des couleurs subtiles, les cordes diaphanes ou puissante sont impeccables, les cuivres colorent sans excès de puissance. La direction de Victorien Vanoosten est souple et puissante. Les tempi allants permettent à l’action dramatique d’avancer. Il sait demander à l’orchestre de belles nuances et obtient des couleurs absolument magiques. Cette belle partition de Bizet prouve, avec ces interprètes si inspirés, toute sa valeur.

Coté visuel les décors d’Antoine Fontaine sont agréables sans véritable originalité ; le bambou est de rigueur, il n’y a pas d’orientalisme pesant non plus. Les lumières de Patrick Meuus transforment agréablement les ambiances mais la lumière sur les héros n’est pas suffisamment précise, ils leur arrivent d’avoir le visage dans le noir pendant qu’ils chantent.

Les costumes de David Belugou sont très lumineux évoquant les soieries aux couleurs éclatantes qui sont celles attendues en Inde ou Ceylan. La mise en scène de Thomas Lebrun est d’un chorégraphe avant tout. Ses danseurs trop présents encombrent la vue des chanteurs et surtout du chœur. Pour sa première grande mise en scène d’opéra il n’a pas su diriger les chanteurs ou créer de scène de foule. Il a préféré la prudence de beaux tableaux statiques hormis les danseurs parfois peu élégants.

Nous avons longuement commenté la mise en scène dans l’émission Un Cactus à L’entracte.

Hubert Stoecklin

Toutes les photos sont de Mirco Magliocca

CRITIQUE. OPÉRA.TOULOUSE.  Théâtre du Capitole, Le 5 octobre 2023. GEORGES BIZET (1838-1875) : les Pêcheurs de Perles. Mise en Scène et Chorégraphie, THOMAS LEBRUN ; Décors, ANTOINE FONTAINE ; Costumes, DAVID BELUGOU ; Lumières, PATRICK MEEUS ; Distribution : ANNE-CATHERINE GILLET, Leïla ; MATHIAS VIDAL, Nadir ; ALEXANDRE DUHAMEL, Zurga ; JEAN-FERNAND SETI, Nourabad ; ORCHESTRE NATIONAL DU CAPITOLE ; Chœur du Capitole (Chef de chœur, GABRIEL BOURGOUIN) ; BALLET DU CAPITOLE (BEATE VOLLACK ; directrice de la danse) ; Direction : VICTORIEN VANOOSTEN.