Un Barbier de Séville tout en énergies à Toulouse

CRITIQUE. OPERA. TOULOUSE, THEATRE NATIONAL DU CAPITOLE, le 24 mai 2022. J.E. KÖPPLINGER. A. CREMONESI. F. SEMPEY. E. ZAÏCIK. K. AMIEL. ONCT.

Un barbiere di qualita, di qualita, si, si !!!!

Cette coproduction capitoline se veut bouffe scéniquement et sacrément belle musicalement. Nous avons entendu la première distribution mais la seconde semble tenir le rang sans craintes. Le Barbier de Séville est un « Melodramma buffo » comme souhaité par Rossini lui-même qui porta ce genre au pinacle. Le décor et les costumes se veulent de la plus délirante fantaisie tout en gardant une certaine élégance. La mise en scène de Josef Ernst Köpplinger reste dans cette ligne comique avec une grande efficacité. Un décor tournant du plus bel effet et sur deux étages, rend presque véridiques les grands imbroglios, les parties de cache-cache et les apartés. La vivacité de la partition trouve son tempo sur scène tout du long sans jamais de temps morts. Tout cela virevolte et séduit par des mouvements permanents. Il faut dire que le Figaro de Florian Sempey a une énergie comique insatiable et sophistiquée digne de la cage aux folles.  Kevin Amiel est un Comte qui s’encanaille au fur et à mesure juste à la limite du trop.  Paolo Bordigna en docteur Bartolo, et Andrea Soare en Berta, mais surtout l’immense Roberto Scandiuzzi en Basilio sont des partenaires admirables. Seule la Rosine d’Eva Zaïcik garde une certaine retenue. Les costumes d’Alfred Mayerhofer participent par leurs couleurs à donner beaucoup de vie aux acteurs. Les lumières sont subtilement discrètes.

Barbier De Séville 2

Coté musical l’orchestre est de vif argent sous la baguette alerte d’Attilio Cremonesi. L’orchestration de Rossini, il faut le reconnaître, est particulièrement succulente dans ce Barbier avec de tels musiciens ! Le chœur, surtout les hommes, s’amuse avec aisance et chante avec plaisir.  Les petits rôles sont parfaitement distribués. Les louanges pour les voix des rôles principaux ne peuvent qu’être totalement heureuses. Florian Sempey est un Barbier si bien chantant et qui joue si habilement qu’il est LE BARBIER du moment. C’est probablement le rôle qu’il chante le plus souvent. Eva Zaïcik a la voix parfaite pour Rosine, le style, les roulades et les trilles, les aigus brillants et des graves admirables. Roberto Scandiuzzi est un Basilio quasi surdimensionné à la voix somptueuse et au jeu pénétrant entre menaces et haut comique.

Barbier De Séville

Paolo Bordigna a une voix agréable et son chant reste toujours élégant ; ce n’est pas le vieux barbon ridicule mais un docteur dans la force de l’âge créant une menace bien crédible pour les deux amants. Reste à évoquer le peu d’adéquation vocale de Kevin Amiel avec la tessiture d’Almaviva et le style rossinien. La voix du ténor est toujours aussi séduisante mais l’aigu ne semble pas aussi facile que dans les rôles lyriques et il n’a pas l’aisance vocale de ses comparses dans le style rossinien si redoutable pour les ténors. S’il est certes un Almaviva agréable, Kevin Amiel n’atteint pas tout à fait le sommet vocal des autres chanteurs.

Ce barbier toulousain est plein de panache, de vie et de beau chant. Il a fait le bonheur du public, ainsi une salle comble a fait savoir son approbation par des applaudissements nourris, per un barbiere di qualita, di qualita !

Hubert Stoecklin


Critique. Opéra. Toulouse. Théâtre du Capitole, le 24 Mai 2022. Gioachino Rossini (1792-1868) : Le Barbier de Séville, melodramma buffo en deux actes ; Livret de Cesare Sterbini d’après Beaumarchais. Créé le 20 février 1816 à Rome. Coproduction Théâtre National du Capitole de Toulouse, Staatsteater am Gärtnerplatz de Munich, Fundacio del Gran Teatre del Liceu de barcelone. Josef Ernst Köpplinger, mise en scène et lumières ; Alfred Mayerhofer, costumes ; Johannes Leiacker, décors ; Michael Heidinger, lumières ; Distribution : Florian Sempey, Figaro ; Eva Zaïcik, Rosina ; Kévin Amiel, le Comte Almaviva; Paolo Bordigna, le Docteur Bartolo ; Roberto Scandiuzzi, Don Basilio ; Edwin Fardini, Fiorello ; Andrea Soare, Berta ; Bruno Vincent, l’Officier ; Frank Berg, Ambrogio ; Orchestre et chœur du Capitole de Toulouse (chef de chœur Gabriel Bourgoin) ; Direction Attilio Cremonesi.