La Kabylie rêvée d’Amel Brahim-Djelloul

La Kabylie rêvée d’Amel Brahim-Djelloul et ses amis est un enchantement !

Cantatrice franco-algérienne, soprano lumineuse baroque et mozartienne, Amel Brahim-Djelloul a bien des cordes à son arc et fait une très belle carrière. Le confinement lui a donné le temps de construire son projet alliant ses racines algériennes et lyriques françaises pour un projet très personnel dédié à la Kabylie. S’entourant de musiciens de grands talents, dont son frère Rachid, d’un véritable arrangeur compositeur, Thomas Keck, et d’une poète kabyle Rezki Rabia, elle a enregistré une heure de musique entièrement dédiée à cette montagne aux magnifiques paysages, un peu magiques avec un coté parfois inquiétant au nord de l’Algérie. C’est ainsi que se succèdent dans une harmonie parfaite des musiques, de variété, des musiques anciennes et des compositions modernes. L’instrumentarium est des plus variés, des instruments modernes : cordes, guitare, clarinette, mandoline, harpe ; plus anciens :  viole de gambe, ney, oud, cithare, mandole ; ou plus traditionnels encore : derbouka, daf, bendir, tar … Le mariage est très heureux et le disque s’écoute comme un voyage très agréable.  La langue kabyle travaillée avec le poète Rezki Rabia coule dans la voix d’Amel avec facilité. Son amour pour la poésie de cette langue se devine à chaque instant, les émotions variées contenues dans les textes sont facilement reconnues, c’est la fête, les retrouvailles, le temps qui passe, la vie qui va, les départs, les séparations, la peur, la joie. La délicatesse du texte dans les A Capella est un enchantement. Savoir ainsi créer une osmose de cette qualité avec tous ces artistes amis est vraiment remarquable. Le résultat passe évidemment par la belle voix d’Amel Brahim Djelloul mais chacun, musicien ou poète est un acteur fondamental. Les racines rêvées de leur Kabylie de paix et de mystère permettent un voyage musical délassant.

Le dialogue orient- occident de la musique ancienne m’est bien connu avec les remarquables concerts construits par Jordi Savall et régulièrement enregistrés : le oud, le ney et la viole de gambe sont des instruments souvent rencontrés. Le travail dans cet enregistrement est tout autre : c’est une recréation de pure poésie ouvrant sur les époques et les genres musicaux divers.

Ainsi les chansons d’Idir sont magiques dans cette voix si pure. Des sonorités qu’Oum Kalthoum ou Fayruz, deux divas chantant en arabe, n’auraient pas désavouées inscrivent certains moments dans un vrai langage musical populaire. Celles écrites pour l’enregistrement par Thomas Keck sur des poèmes de Rezki Rabbia ont un charme intemporel et complètent admirablement le programme. Le confinement a été prolifique car ce projet a pu se fortifier et s’enregistrer en suivant.

Les photos du très beau livret des musiciens masqués rappellent cette époque si étrange. Le résultat est un Chemin qui monte vers des lieux de paix et de bonheur. La qualité précise de l’enregistrement ajoute au charme de l’écoute et les traductions du livret permettent de comprendre la poésie subtile des textes. Une série de concerts est programmée, nous savons que le succès sera au rendez-vous !

Un lien vers une vidéo de l’enregistrement

Le site de la cantatrice

Critique. CD. Amel Brahim -Djelloul, soprano. Les Chemins qui montent. Thomas Keck, arrangements, composition, guitare. Rezki Rabia, textes, et traductions kabyles. Instrumentistes divers.  Klarthe Records. Avril 2021. 15 pistes. Durée 60’. Numéro : 3 760330 961 1682.